Petit résumé de la crise constitutionnelle en Israël

1. En novembre dernier les élections démocratiques du Peuple d’Israël ont porté au pouvoir avec une majorité de 64 voix sur 120 une coalition dirigée par le leader du principal parti ayant obtenu 30 sièges, M. Binyamin Netanyahou.

2. En Israël depuis une trentaine d’années, la Cour suprême, en vertu de principes développés par sa jurisprudence uniquement, s’est livrée à ce qu’elle a appelé « l’activisme judiciaire » intervenant dans tous les domaines de la vie sociale et de plus en plus dans le domaine politique. Sur cette base, elle a procédé à ce qu’elle a nommé une « révolution constitutionnelle » la plaçant prétendument au-dessus du Pouvoir Exécutif et au-dessus du Pouvoir Législatif.

  1. Ce positionnement résulte notamment d’une approche philosophique rejetant la démocratie « arithmétique » (selon laquelle, depuis 250 ans environ, c’est à la majorité des élus de la Nation qu’il revient de définir le « Bien Public »), comme « démocratie formelle ».

 

  1. Cette philosophie, inspirée du Post-modernisme, prône une « démocratie des valeurs », valeurs qui devraient être définies par un « Public Eclairé » et singulièrement surtout les Juges de la Cour Suprême, qui doivent être recrutés par une Commission dans laquelle le « public éclairé » est assuré de disposer de la majorité.

 

  1. Cette approche est en réalité anti-démocratique, la dénonciation de la « démocratie formelle », de même nature que celle des marxistes du 19ème siècle, et pire encore, la prise en compte d’une prétendue « aristocratie » ramenant notre pays à un régime quasi féodal !

 

  1. Depuis le début de la « révolution constitutionnelle », de nombreux juristes, avocats, professeurs de droit, hommes politiques, Ministres de la Justice, se sont élevés contre cette approche et cette pratique et ont souhaité une réforme, rétablissant la doctrine israélienne antérieure qui préconisait une abstention volontaire de la Cour Suprême d’intervenir dans les domaines politiques. C’est le cas de l’actuel Ministre de la Justice qui avait clairement annoncé son intention durant la campagne électorale.

 

  1. Or, dès la formation du Gouvernement actuel a été déclenché contre lui un tir de barrage sans précédent, de l’opposition parlementaire, des principaux médias, et dans les rues des grandes villes avec des moyens considérables, jamais vus en Israël, pendant des mois entiers. Les organisateurs refusent absolument de révéler l’origine des fonds considérables manifestement à leur disposition.

 

  1. La cause immédiate de la crise est la loi sur la limitation du cas d’ouverture d’un litige devant la Cour Suprême, fondé sur la « raisonnabilité » d’une décision du Gouvernement ou de la Knesset et les autres mesures limitées constituant la réforme judiciaire destinée à rétablir la séparation des pouvoirs. Ce cas d’ouverture donne aux magistrats entière latitude, même sans base légale, d’annuler lois, règlements, circulaires, bref tout acte législatif ou de gouvernement dans des conditions qui établissent un véritable « Gouvernement des Juges » laissant dans l’ombre les élus du Peuple.

 

  1. La contestation a pris une ampleur frisant la frénésie au point de briser plusieurs principes fondateurs du Pays et même remettant en cause l’idéal national juif : la tentative de chantage de certaines unités de l’armée, le sabotage délibéré de l’économie nationale par l’appel aux banques internationales d’abaisser le crédit international d’Israël, l’encouragement à l’émigration de certaines élites, ou supposées telles, comme les spécialistes du High Tech, les médecins, les capitaines d’industrie et de conglomérats commerciaux etc…, l’appel aux interventions étrangères dans les affaires intérieures d’Israël.

 

  1. D’immenses défilés de « chaperons rouges » furent organisés, figurant les femmes qui soi-disant, deviendraient à terme maltraitées en Israël, de véritables esclaves sexuelles, au cas où la réforme serait adoptée , délire mettant en lumière la peur panique irrationnelle d’une partie de la population israélienne si ignorante de ses sources, et de la réalité des principes de la Tradition Juive qui est une théologie de la liberté, qu’elle croit devoir chercher son inspiration dans des romans d’anticipation échevelés. La peur de la vie spirituelle comprise comme une mise en chaînes, a pris dans ce milieu des proportions démentielles.

 

  1. Lorsque la loi préconisant le retour à la doctrine israélienne relative au respect de la séparation des pouvoirs et au statut de la Cour Suprême a été présentée dans la commission adéquate de la Knesset, qui est le lieu où d’ordinaire les oppositions, suggestions et améliorations sont soulevées, l’opposition s’est totalement cantonnée dans un rôle d’obstruction systématique, craignant sans doute le délire continué de la rue.

 

  1. Dans un esprit de conciliation, le gouvernement a accepté de continuer à débattre de concessions éventuelles, selon une procédure totalement exceptionnelle, sous les auspices du Président de l’Etat, que la loi ne qualifie nullement dans ce domaine. Or, pendant trois mois, les négociateurs au nom de l’opposition, sous la pression des extrémistes de la rue sont restés en fin de compte au stade de l’obstruction.

 

  1. La loi a finalement été votée, selon la procédure démocratique par une majorité de 64 voix sur les 120 que compte la Knesset. Or il s’agit de la modification d’une loi fondamentale dont le statut est supérieur à celui d’une loi ordinaire, modification parfaitement légale de la part de la Knesset en vertu du pouvoir constituant qui lui a été reconnu par la Cour Suprême elle-même.

 

  1. Mais la Cour Suprême ne possède pas pour sa part de pouvoir constituant et en bonne logique juridique doit impérativement s’abstenir d’intervenir positivement ou négativement dans cette décision sous peine de provoquer une crise constitutionnelle sans précèdent qui dans le climat actuel, tel que développé par l’opposition pourraient devenir une crise intérieure majeure, une partie de l’armée obéissant au Gouvernement légal et une autre à la Cour Suprême. Il s’agit donc pour la cour plus que jamais de faire preuve de responsabilité nationale.

 

  1. Or de nombreux plaideurs de l’opposition, ont immédiatement attaqué la loi devant la cour, et celle-ci, d’ores et déjà a accordé un « Tsav al tnaï », une ordonnance sous condition, se reconnaissant, en violation de la loi constitutionnelle, comme compétente pour éventuellement sanctionner cette loi.

 

  1. La crise majeure est déjà là. On peut encore espérer que la composition plénière sans précédent des quinze juges de la cour pèsera avec un soin particulier les conséquences d’une telle violation de son statut, pour la loi, pour le Pays et pour le Peuple Juif tout entier.

 

Léon Rozenbaum

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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