Juges de la légalité ou juges de l’opportunité ?

La question de principe qui divise la Nation est finalement celle-là : Y-a-t-il eu un glissement sémantique dans la définition du rôle de la Cour Suprême en Israël qui exige une correction, oui ou non ?
Le rôle des Juges est-il de juger si une décision d’un corps constitué, Gouvernement, Parlement, Administration et autres, est conforme à la loi édictée par le Parlement, expression de la volonté du Peuple souverain, ou bien est-il de déterminer la « vraie » bonne décision opportune dans le cas d’espèce, et glisser insensiblement vers le « Gouvernement des Juges » pour conjurer le risque éventuel d’excès de pouvoir de l’Exécutif ou du Législatif ?

Une partie de la population appelle ce pouvoir judiciaire « sauver la démocratie » et la majorité parlementaire qui s’est dégagée du vote populaire, il y a moins de six mois, le considère comme le « dévoiement de la démocratie ».

Généralement on n’entame pas une guerre civile pour une question comme celle-là. Cependant, le Peuple Juif depuis 4000 ans environ a choisi la morale comme constitution, ce qui le distingue, tout à son honneur, du classique objet de la recherche de puissance. Or, comme il a connu l’exil de 1900 ans le plus long de l’Histoire connue des hommes, et donc a survécu comme peuple dans un univers talmudique de questions morales souvent théoriques, la certitude d’être du bon côté moral peut entrainer chez lui des dérives gravissimes.

Il reste que se disputer ainsi pour ce qui apparaît aux yeux de beaucoup comme finalement une question de technique juridique mineure, alors que tout le monde est d’accord pour vivre sous un régime démocratique respectueux de l’héritage juif, au moment précis où la haine forcenée des Juifs relève la tête et menace gravement le pays, et la sécurité des Juifs dans le monde, en Iran, en Europe et ailleurs, il faut être gravement irrationnel.

Nos ennemis eux-mêmes, devant un tel étalage de fureur des Israéliens juifs les uns contre les autres, risquent de s’y tromper et croire le moment favorable pour tenter de nous détruire. Ce danger-là n’est pas du tout théorique. Et il ne faudrait pas qu’au moment décisif, en cas d’attaque, nos divisions internes puissent paralyser nos capacités défensives très réelles.

L’auteur de ces lignes a certes pris parti : il pense que les juges doivent revenir à leur vocation véritable qui est de juger en fonction de la loi et non de gouverner à la place des élus du peuple. Il appelle toutefois tous ses concitoyens à préserver l’essentiel, l’indépendance et la souveraineté juive dans son pays recouvrées après tant de larmes et d’efforts. Prendre en compte le souci de l’autre partie doit être le maître-mot.

Léon Rozenbaum

Avocat et Notaire au Barreau d’Israël

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